In the Picture

Version pdf Archives Inscrivez-vous

Accrochez-vous, le CSDD arrive!

Novembre 2022

Imaginez...

Vous travaillez en tant qu'acheteur pour un grand fabricant européen de vêtements de loisirs. Vous travaillez depuis de nombreuses années en étroite collaboration avec un fournisseur de textiles d’un pays tiers.

Un jour, votre compliance officer frappe à votre porte et vous montre une série d'articles consacrés aux mauvaises conditions de travail des ouvriers de ce fournisseur et à des rejets d'eaux usées, qui ont provoqué des manifestations de la part de groupes d'action locaux.

Les conditions commerciales dont vous bénéficiez avec ce fournisseur sont très avantageuses. Votre conscience vous ronge, mais vous voulez tout de même maintenir cette relation. En outre, vous avez contractuellement fait reposer toute responsabilité presque exclusivement sur le fournisseur. Êtes-vous alors vraiment en danger?

Quelques précisions.

La Commission européenne a proposé en février 2022 une directive sur la "diligence raisonnable en matière de durabilité des entreprises" (la Corporate Sustainability Due Diligence Directive ou CSDD). L'objectif de cette directive est de promouvoir un comportement durable et responsable de la part des entreprises et de les encourager à s'attaquer aux impacts négatifs de leurs actions, tant en Europe qu'à l’étranger. Ce faisant, elle vise à intégrer davantage de considérations relatives aux droits de l'homme et à l'environnement dans le mode de fonctionnement des entreprises.

Selon la proposition, la CSDD s'appliquera aux entreprises européennes et non européennes d’une certaine taille, qui varie selon que l'entreprise opère ou non dans un secteur à haut risque, comme la production de textiles, la production alimentaire ou encore l'exploitation minière.

Les entreprises concernées seront tenues d'identifier, de prévenir, d'atténuer et d'éliminer les impacts négatifs sur les droits de l'homme et l'environnement non seulement de leurs propres activités, mais aussi de celles de leurs filiales et de leurs partenaires commerciaux usuels (fournisseurs, distributeurs, agents). La proposition de CSDD fait référence, par exemple, au travail de mineurs, aux conditions de travail des ouvriers, à la pollution et à la perte de biodiversité.

Les entreprises devront intégrer dans leurs politiques une diligence raisonnable appropriée pour ces questions et communiquer publiquement à leur sujet. Elles pourront le faire, par exemple, en incluant des garanties contractuelles qui obligent un fournisseur à respecter un code de conduite et des plans d'actions préventifs. Si ces mesures s’avérent insuffisantes, l'entreprise devra s'abstenir de poursuivre ou d'étendre ses activités avec ce fournisseur, suspendre temporairement cette relation ou, si les effets sont graves, même y mettre fin. La CSDD pourrait donc avoir des conséquences considérables sur la relation commerciale entre notre fabricant de vêtements européen et son fournisseur controversé.

Le groupe des plus grandes entreprises devra également élaborer un plan visant à aligner la stratégie commerciale sur la transition vers une économie durable et la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C maximum.

Tous les administrateurs des entreprises concernées devront établir un processus de diligence raisonnable, l'intégrer dans la stratégie de l'entreprise et contrôler et mettre à jour sa mise en œuvre chaque année. Dans ce cadre, ils devront également tenir compte de l’impact de leurs décisions sur le plan du respect des droits de l'homme, du changement climatique, et de l’environnement. À défaut, leur responsabilité d’administrateur pourra être engagée.

En vertu de la CSDD, les entreprises devront prévoir une procédure permettant aux victimes ou à des groupements représentatifs de déposer une plainte pour dénoncer les activités de l'entreprise concernée ou celles de ses fournisseurs ou distributeurs. Si la plainte est fondée, l'entreprise devra prendre des mesures appropriées.

Une nouvelle autorité veillera au bon respect de la CSDD dans chaque Etat membre. Cette autorité aura le pouvoir, de sa propre initiative ou sur la base d'une plainte, de mener des perquisitions et d'imposer des sanctions, en ce compris des amendes et des injonctions, en vue de faire cesser ou de remédier aux violations de la CSDD. Les victimes pourront également obtenir de l'entreprise concernée une indemnisation du préjudice résultant du fait qu'elle n'a pas pris les mesures appropriées pour prévenir, atténuer et faire cesser l’impactnégatif.

Cette initiative législative n’est pas un acte isolé. Avant la proposition de CSDD, la Commission avait déjà publié, en avril 2021, une proposition de directive sur les rapports de diligence raisonnable appropriés (directive sur les rapports de durabilité des entreprises). En outre, depuis le 10 mars 2021, le règlement sur les informations relatives à la durabilité dans le secteur des services financiers (Sustainable Finance Disclosure Regulation) est applicable. Enfin, le règlement délégué relatif aux critères techniques de sélection pour l'atténuation du changement climatique (Taxonomy Climate Delegated Act) est entré en vigueur le 1er janvier 2022.

Quelle est la prochaine étape?

La proposition de CSDD est actuellement en phase de première lecture par le Conseil des ministres. Des modifications de fond sont attendues au cours de la procédure législative. Après l'adoption par le Conseil et le Parlement européen, les États membres de l'Union européenne disposeront de deux ans pour transposer la directive dans leur droit national.

Concrètement. 

  • Dans le cadre de la CSDD, les grandes entreprises et les entreprises opérant dans des secteurs spécifiques à haut risque devront prendre en compte les conséquences de leurs choix commerciaux sur les droits de l'homme et l'environnement. Cela vaut aussi pour leurs filiales et de leur chaîne de valeur, de manière plus linéaire.  
  • Les impacts négatifs sur les droits de l'homme et l'environnement devront être identifiés et prévenus, atténués ou supprimés par des mesures appropriées. Ces réflexes devront faire partie de la stratégie de l'entreprise et être contrôlés par les administrateurs.
  • Chaque État membre disposera d'un nouveau régulateur qui pourra imposer des amendes et lancer des poursuites en cas de violation des obligations de la CSDD.
  • Les victimes pourront obtenir une indemnisation du préjudice résultant du non-respect des obligations de la CSDD et les entreprises concernées devront organiser leur propre procédure de plainte.  

Plus d’infos ?

Pour plus de détails ou toutes questions, nous vous invitons à consulter notre site web ou à contacter notre équipe :

Close